Le
18 novembre 1659, Catherine de Rambouillet, l’égérie
des salons précieux, assiste à la première de la
nouvelle pièce à succès de Molière, Les
Précieuses ridicules.
Loin de s’offusquer du ridicule qu’il leur prête, elle
décide de recevoir cette farce en « visite »
dans son propre salon, le « salon bleu ». Car
elle sait bien qu’il s’agit d’une farce, et pas d’autre
chose.
Dans
cette nouvelle mise en scène, la farce de Molière sera
encadrée par des jeux littéraires
qui animaient les salons des Précieuses. Ces textes témoignent
de la finesse d’esprit que ces femmes cultivées et
émancipées mettaient à l’honneur. Ils viennent
en contrepoint de la cruauté de la farce qui développe,
dans la tradition française, le déguisement, la
bastonnade, la tromperie et les coups de force.
La
férocité de celle-ci s’applique particulièrement
à décrire des galants sèchement éconduits
et durement revanchards, un père sans coeur et méprisé
par des jeunes filles provinciales prétentieuses, et
elles-mêmes abusées, dans une dynamique de
« couples »
de personnages rongés par la rivalité, qui revitalise
les très conventionnels trompeurs trompés. Ainsi
s’affrontent, de l’extérieur comme de l’intérieur,
les générations, les hommes et les femmes, les milieux
sociaux : les lignes de partage se multiplient... Ainsi se
tisse
un réseau de relations impitoyables, dont pas un(e) n’est
exempté(e).
Une
férocité, certes, mais une férocité qui
prête à rire. Est-ce la férocité qui y
gagne, ou le rire ?
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